Les Femmes violées
Les atrocités des Prussiens continuent
à Versailles.
De nombreuses femmes et jeunes filles ont
été violées, non seulement par les soldats,
mais aussi par les officiers.
Plusieurs sont devenues folles à la suite
de ces violences, d'autres sont mortes.
Les Journaux.
Ces mortes que la brise effleure
De leurs chevelures voilées,
Ces mortes blanches, tout à l'heure
C'étaient des femmes violées.
Sur leur front triste et sur leur face,
Le vent caressant qui se joue,
De son aile tremblante efface
Vos baisers de sang et de boue.
O Prussiens, ô capitaines!
Tout à l'heure ces femmes pâles
Suppliaient vos lèvres hautaines
Avec des sanglots et des râles;
Et vous, les mains de sang tachées,
Gais, meurtrissant chaque victime,
Devant leurs mères attachées,
Vous avez froidement... O crime!
A l'heure où vos fils à l'oeil sombre
Pleureront aux lueurs des lampes,
Où la Mort posera dans l'ombre
Son doigt de marbre sur vos tempes,
Vous les reverrez, ces martyres
Qui, la prunelle encor vivante,
Sous vos caresses de satyres
Se débattaient dans l'épouvante!
Oui, ces cadavres et ces folles,
Tendant leurs longues mains d'ivoire,
Contre vous alors, sans paroles
Témoigneront dans la nuit noire.
Et Dieu, dans la voûte étoilée,
Ne verra votre âme anxieuse
Qu'à travers l'horrible mêlée
De leur troupe silencieuse.
Montrant au ciel qui les regarde
Leurs ventres souillés, vos amantes,
Foule hâve, morne, hagarde,
Tordront leurs lèvres écumantes.
Plus blanches qu'une aile de cygne,
Elles vous montreront, vous dis-je,
D'un doigt vengeur qui vous désigne;
Et vous, par un affreux prodige,
Au fond de leurs foules obscures,
Dans les ombres visionnaires
Vous apercevrez les figures
De vos filles et de vos mères!