Châteaudun
Châteaudun! qui vois des bourreaux
Où furent des coeurs de lion,
Tu nous parais, nid de héros,
Plus sublime qu'un Ilion.
Comme on fauche des épis mûrs,
Les boulets rougis et fumants
Ont dans les débris de tes murs
Dispersé tes abris charmants;
Mais tes fils, les chasseurs de loups,
Sont tombés purs et sans remords.
Ils étaient mille, et sous leurs coups
Dix-huit cents Prussiens sont morts.
Illustre cité (les Romains
Te nommaient ainsi) pour tes fils
Tu renâitras! par tes chemins
On entendra, comme jadis,
Dans tes arbres en floraison
L'alouette éveiller l'écho.
La devise de ton blason
Dit: Extincta revivisco!
Mais, froid cadavre au pied des tours
Parmi les décombres mouvants
Fouillé par le bec des vautours,
Et cendre abandonnée aux vents,
Tu resplendis! patrie en deuil,
Qui, devant le destin moqueur
Moins obstiné que ton orgueil,
Portas la France dans ton coeur!
Car tes défenseurs belliqueux,
Frémissant d'indignation,
Laissaient à de plus lâches qu'eux
L'ignoble résignation;
Voulant tous, d'un esprit têtu,
Que ton beau renom pût fleurir,
Ils eurent la mâle vertu
De tuer avant de mourir,
Et rien ne vaut le fier sommeil
De ces soldats couchés en rang
Sur la terre nue, au soleil,
Qui dorment, couchés dans leur sang.