Alsace
Toute désolée et meurtrie,
Notre Alsace, en proie aux horreurs,
Dans son sein de mère patrie
Nous trouve encor des francs-tireurs.
Où se forment-ils? On l'ignore.
Calmes et le fusil aux doigts,
On les voit paraître à l'aurore,
Devant quelque bouquet de bois
D'où leur troupe au combat s'élance,
Ou bien émerger d'un rideau
D'arbres noirs, ou bien en silence
Suivre quelque petit cours d'eau.
Leur flot se masse ou s'éparpille;
Harcelant, pillant les convois,
Ils fusillent, on les fusille;
Ils vont, par les temps les plus froids,
Affrontant la neige brûlante
Et le plomb qui siffle à l'entour,
Embrasser une Mort sanglante
Avec de grands transports d'amour.
Mais en vain le plomb les dévore:
Exterminés, ils sont vivants;
On les entend crier encore
Le nom de France aux quatre vents;
Et l'Alsace française admire,
Sur son vieux sol bouleversé,
Ces enfants au hardi sourire
Qui renaissent du sang versé!