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 Théodore de Banville (1823-1891) Tristesse de Darimon

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MessageSujet: Théodore de Banville (1823-1891) Tristesse de Darimon   Théodore de Banville (1823-1891) Tristesse de Darimon Icon_minitimeDim 21 Aoû - 23:02

Tristesse de Darimon


Il va venir, le bal prochain des Tuileries.
Bientôt, sous les éclairs des torchères fleuries,
Sous les lustres charmants,
Vont resplendir, riant au rayon qui les flatte,
Les ors, les fins tissus de rose et d'écarlate
Et les clairs diamants!

Oui, la fête est déjà préparée, et le sage
Darimon, ce mortel par qui le bavardage
Fut toujours évité,
Darimon, qui devint fameux, sans violence,
Par sa culotte courte et son hardi silence,
N'y fut pas invité.

Il doute encor. Longtemps il cherche, il interroge.
Rien toujours. Alors il dépêche vers la loge,
Où cogne, loin du ciel,
Un savetier, sa bonne, une tremblante vierge.
En vain. Tu n'étais pas venu chez le concierge,
Carton officiel!

Et, comme il se disait, à part lui, tout morose:
L'espoir que je gardais était bien peu de chose,
Puisque ma bonne y ment,
Son regard tomba sur la célèbre culotte.
Alors, tirant les mots de son coeur qui sanglote,
Il fit ce boniment:

O culotte! lambeau de ma joie envolée!
Toi qui naguère, ici montagne, ailleurs vallon,
Ainsi qu'un gant docile à ma jambe collée,
Moulas avec orgueil des formes d'Apollon!

Pour une fois du moins, reste à ce clou. Demeure
Parmi le vétiver, le camphre et le fenouil.
N'existons-nous donc plus? Avons-nous eu notre heure?
A quoi va nous servir notre épée en verrouil?

D'autres vont maintenant valser où nous valsâmes.
Et tes soeurs, mariant leurs sévères contours
A ceux des fracs brillants de rubans et de flammes,
Te voleront ta gloire, ô mes chères amours!

Oui, d'autres à leur tour viendront, couples sans tache,
Faire voir au Paris jeune, heureux, enchanté,
Ce que l'art du tailleur au torse qui se cache
Ajoute d'élégance et de solennité!

Oh! dites-moi, clairons des Strauss, flûtes si pures,
Violons, tour à tour fougueux et délicats,
Est-ce que vous ferez pour d'autres vos murmures?
Est-ce que vous jouerez pour d'autres vos polkas?

Dieux! Elle et moi, parmi tant de robes à queues,
Nous défilions si bien au bruit de tes accords,
Orchestre qui lançais au fond des voûtes bleues
Les soupirs du hautbois et la plainte des cors!

Répondez, ô buffets dressés en mille places!
Est-ce que vous aurez, amis ingrats et sourds,
Le courage d'offrir à d'autres gens vos glaces
Et vos verres de punch avec vos petits fours?

Eh bien, oubliez-nous, salons, flûte sylvestre!
Va, musique! buffet, sers ton friand repas!
Luis, girandole! punch, ruisselle! joue, orchestre!
Ceux que vous oubliez ne vous oublieront pas.

Ou plutôt, cher témoin de ma défaite insigne,
Qui rêves près de moi, triste comme un linceul,
Tandis que je profère une plainte de cygne,
Viens, culotte! je veux te mettre pour moi seul!

Et tu vas voir comment je suis, quand je me lance!
Mais nul chroniqueur, par la ville ou dans les cours,
Ne saura qu'aujourd'hui j'ai rompu le silence...
Et les journaux du soir n'auront pas mon discours!
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Théodore de Banville (1823-1891) Tristesse de Darimon
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