PLUME DE POÉSIES
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

PLUME DE POÉSIES

Forum de poésies et de partage. Poèmes et citations par noms,Thèmes et pays. Écrivez vos Poésies et nouvelles ici. Les amoureux de la poésie sont les bienvenus.
 
AccueilPORTAILS'enregistrerDernières imagesConnexion
 

 Paul Verlaine (1844-1896) L'Impénitence finale

Aller en bas 
AuteurMessage
James
FONDATEUR ADMINISTRATEUR
FONDATEUR ADMINISTRATEUR
James


Masculin
Dragon
Nombre de messages : 149301
Age : 59
Localisation : Mon Ailleurs c'est Charleville-Mézières
Date d'inscription : 04/09/2007

Paul Verlaine (1844-1896)  L'Impénitence finale Empty
MessageSujet: Paul Verlaine (1844-1896) L'Impénitence finale   Paul Verlaine (1844-1896)  L'Impénitence finale Icon_minitimeLun 29 Aoû - 0:01

L'Impénitence finale

À Catulle Mendès.

La petite marquise Osine est toute belle,
Elle pourrait aller grossir la ribambelle
Des folles de Watteau sous leur chapeau de fleurs
Et de soleil, mais comme on dit, elle aime ailleurs.
Parisienne en tout, spirituelle et bonne
Et mauvaise à ne rien redouter de personne,
Avec cet air mi-faux qui fait que l'on vous croit,
C'est un ange fait pour le monde qu'elle voit,
Un ange blond, et même on dit qu'il a des ailes.

Vingt soupirants, brûlés du feu des meilleurs zèles
Avaient en vain quêté leur main à ses seize ans,
Quand le pauvre marquis, quittant ses paysans
Comme il avait quitté son escadron, vint faire
Escale au Jockey ; vous connaissez son affaire
Avec la grosse Emma de qui - l'eussions-nous cru ?
Le bon garçon était absolument féru,
Son désespoir après le départ de la grue,
Le duel avec Gontran, c'est vieux comme la rue ;
Bref il vit la petite un jour dans un salon,
S'en éprit tout d'un coup comme un fou ; même l'on
Dit qu'il en oublia si bien son infidèle
Qu'on le voyait le jour d'ensuite avec Adèle.
Temps et moeurs ! La petite (on sait tout aux Oiseaux)
Connaissait le roman du cher, et jusques aux
Moindres chapitres : elle en conçut de l'estime.
Aussi quand le marquis offrit sa légitime
Et sa main contre sa menotte, elle dit : Oui,
Avec un franc parler d'allégresse inouï.
Les parents, voyant sans horreur ce mariage
(Le marquis était riche et pouvait passer sage),
Signèrent au contrat avec laisser-aller.
Elle qui voyait là quelqu'un à consoler
Ouït la messe dans une ferveur profonde.

Elle le consola deux ans. Deux ans du monde !

Mais tout passe !
Si bien qu'un jour qu'elle attendait
Un autre et que cet autre atrocement tardait,
De dépit la voilà soudain qui s'agenouille
Devant l'image d'une Vierge à la quenouille
Qui se trouvait là, dans cette chambre en garni,
Demandant à Marie, en un trouble infini,
Pardon de son péché si grand, si cher encore,
Bien qu'elle croie au fond du coeur qu'elle l'abhorre.

Comme elle relevait son front d'entre ses mains,
Elle vit Jésus-Christ avec les traits humains
Et les habits qu'il a dans les tableaux d'église.
Sévère, il regardait tristement la marquise.
La vision flottait blanche dans un jour bleu
Dont les ondes, voilant l'apparence du lieu,
Semblaient envelopper d'une atmosphère élue
Osine qui tremblait d'extase irrésolue
Et qui balbutiait des exclamations.
Des accords assoupis de harpes de Sions
Célestes descendaient et montaient par la chambre,
Et des parfums d'encens, de cinnamome et d'ambre
Fluaient, et le parquet retentissait des pas
Mystérieux de pieds que l'on ne voyait pas,
Tandis qu'autour c'était, en cadences soyeuses,
Un grand frémissement d'ailes mystérieuses
La marquise restait à genoux, attendant,
Toute admiration peureuse, cependant.

Et le Sauveur parla :

« Ma fille, le temps passe,
Et ce n'est pas toujours le moment de la grâce.
Profitez de cette heure, ou c'en est fait de vous. »

_________________
J'adore les longs silences, je m'entends rêver...  
James

Paul Verlaine (1844-1896)  L'Impénitence finale Une_pa12Paul Verlaine (1844-1896)  L'Impénitence finale Plumes19Paul Verlaine (1844-1896)  L'Impénitence finale James_12Paul Verlaine (1844-1896)  L'Impénitence finale Confes12


Paul Verlaine (1844-1896)  L'Impénitence finale Sceau110
Revenir en haut Aller en bas
https://www.plumedepoesies.org
 
Paul Verlaine (1844-1896) L'Impénitence finale
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Paul Verlaine (1844-1896) A Georges Verlaine.
» Paul Verlaine (1844-1896) XX A Paul Vérola.
» Paul Verlaine (1844-1896) A Ph***.
» Paul Verlaine (1844-1896) Eté
» Paul Verlaine (1844-1896) A E*** I.

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
PLUME DE POÉSIES :: POÈTES & POÉSIES INTERNATIONALES :: POÈMES FRANCAIS-
Sauter vers: