PLUME DE POÉSIES
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 Victor HUGO (1802-1885) Crois-tu donc qu'on sera César sans l'expier?

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Victor HUGO (1802-1885) Crois-tu donc qu'on sera César sans l'expier? Empty
MessageSujet: Victor HUGO (1802-1885) Crois-tu donc qu'on sera César sans l'expier?   Victor HUGO (1802-1885) Crois-tu donc qu'on sera César sans l'expier? Icon_minitimeDim 27 Nov - 22:40

Crois-tu donc qu'on sera César sans l'expier?
Qui donc t'a dit qu'on puisse être, sans récompense,
Epictète qui saigne en même temps qu'il pense?

Rêves-tu que toujours les uns seront en haut,
Rois que le trône fait exempts de l'échafaud,
Prêtres grands par le mal, soldats forts par le' crime,
Et les autres en bas, subissant tout l'abîme?
Vois-tu le ciel pencher et crouler quelque part?
Tout a son contrepoids. Comptes-tu, par hasard,
Sans la grande équité qui se révèle et vibre
Et luit de tous côtés dans l'immense équilibre?
Dis, crois-tu que les uns seront mal, d'autres bien,
Que les uns auront tout, les autres n'ayant' rien,
Ceux-ci sans pain, ceux-là couvrant de mets' leurs tables,
Et qu'il ne viendra point des reflux redoutables?
Attends le dénoûment. La fin mettra le sceau.
Compte sur les retours. Crois-tu que le pourceau,
Formidable mangeur de toute pourriture,
De vos vomissements fera sa nourriture,
Hélas! et souffrira ce tourment sous le ciel
D'ouvrir la bouche au fond de l'égout'éternel,
Et d'être l'être infect souillé par l'être horrible;
Et qu'il ne viendra pas un jour, un jour terrible,
Où le monstre, penché sur tous, resplendissant
De la sombre lueur du monde finissant,
Éclaboussant quiconque a vécu dans l'ordure,
Ceux dont le coeur fut noir, ceux dont l'âme fut dure,
Les prêtres sur l'autel, les rois sous leur cimier,
Dans un hoquet vengeur leur rendra leur fumier "1!
XXI
Jeunes hommes éclos sous l'empire rapace,
Frais, roses et glacés, vous dites quand je passe:
« -Ah çà! qu'est-ce que c'est que cet homme? il est fou.
Les vieux ont pour devoir d'être vieux. Un hibou
N'a pas le droit d'aimer le soleil. A son âge,
Il devrait de l'hiver faire le personnage,
Et ne point se répandre en élans-insensés..
.
Quoi donc! il dit Encor! quand, nous disons Assez!
Un falot nous suffit; il lui faut l'aube immense.
Il va, criant: Progrès! Fraternité! Clémence!
Enfantillage. Il est à ce point puéril
D'accepter un devoir qui contient un péril.
Il veut la liberté quand il a la vieillesse;
Qu'en fera-t-il? Aïeul, quitte ce qui te laisse,
Quand auras-tu fini d'avoir vingt ans,vieillard?
Il veut le plein midi, nous aimons le brouillard;

Au sac d'or qui nous charme, il préfère une idée.
Quand l'homme est vieux, il sied que l'âme soit ridée.
Il veut des droits pour nous qui voulons des écus.
Il pense qu'on a tort d'écraser les vaincus;
Il ne voit pas qu'Octave est couvert par Auguste;
Il en est à ne pas comprendre qu'il est juste
De faire arquebuser par monsieur Galliffet
Les gens dont on a peur, quand même ils n'ont rien fait;
Qu'il faut de bons bourreaux dans la guerre civile;
Et qu'on ne doit pas plus plaindre un peuple, une ville,
Pour quelques va-nu-pieds qu'on a pris, mis sous clé,
Ou tués,qu'on ne plaint un champ qu'on a sarclé.
Cet homme est la démence et nous sommes les sages.
Ah! comme c'était bon, les antiques usages!
Quand verra-t-on les fous, les brouillons, les bavards,
Pendre aux arbres gaîment le long des boulevards?
Quoi! nés d'hier, c'est nous dont la raison éduque
Cette caboche dure, ingénue et caduque!
Il. est plein de chimère et plein de vision.
Comme ,le rossignol 'et comme l'alcyon,
Il chante dans la nuit et court à la tempête.
Cetté vieille âme semble au combat toujours prête;
Il recommencerait l'exil, s'il le fallait;
II est' stupide. Çà, bonhomme, apprends qu'il est
Deux enfances, et sache, Argan; qu'on y retombe;
L'une est près du berceau, l'autre est près de la tombe.
Les pierres, les sifilets, voilà ce qu'on te doit.
Ce n'est pas sans raison qu'on te montre du doigt,
Qu'un bébé fait ta joie, et que ta tête blanche,
Comme vers tes pareils, vers les enfants se penche.
Trop de jeunesse est grave à ton âge; il est bon
De n'être point marmot alors qu'on est barbon;
Chérubin dans la peau de Géronte fait rire.
Nous te le répétons, il faut savoir proscrire,
Frapper, amputer; vaincre, et le bien sort des maux.
Rêveur, laissons un peu de côté les grands mots,
Ne déclamons pas. Vois le fond réel des choses.
Nous acceptons les faits sans en chercher les causes,
Disons la' vérité crûment; l'homme est complet
Lorsqu'il est le plus fort; on est riche, on s'y plaît;
Est-ce que ce n'est pas tout simple? On a des rentes,
Elles ne nous sont 'pas du tout indifférentes;
Plus de champagne à boire et de truffe à manger,
Nous l'avouons tout net, c'est poùr nous un danger;
Donc nous nous défendons, c'est juste. Diogène,
Rageant de voir dîner Trimalcion, le gêne.
La politique est l'art utile d'émonder.
Supprimer, c'est créer; châtrer, c'est féconder.
Quand la sève au printemps déborde et surabonde,
Une serpe a raison de cette vagabonde;
LA CORDE D'AIRAIN, XXII RENTRÉE DANS LA SOLITUDE 551
Couper le rameau fou qui fait tort au voisin,
Est sage; un jardinier est-il un assassin?
L'arbre étant surchargé d'un feuillage inutile
Et farouche, on le sauve alors qu'on le mutile;
Qui donc est de trop? nous, gens d'esprit, 'qui brillons?
Non! mais. les malvenus, les grabats, les haillons,
Les misères, les gueux, ceux que tu recommandes,
Pleutre, et les meurt-de-faim sont les branches gourmandes.
Qu'on les retranche. On a Cayenne pour cela.
Toujours un. peu de sang sur l'ordre ruissela;
.Ce n'est pas. notre faute, et sot qui s'apitoie.
Un ouragan balaye, un carnage nettoie.
L'homme d'état réel prend son temps; celui-là,
Adroit, sait être Monck, et, fort, être Sylla.
Quoi donc! ton âge ignore et le nôtre t'enseigne!
Le peuple est un fiévreux qu'il faut:parfois qu'on saigne;
L'homme est habile et grand parmi les souverains
Qui lui lace un gilet de force sur les reins.
Le peuple est ton pégase, il est notre bourrique.
Sans doute il faut savoir user de rhétorique,
Jurer qu'on est du siècle, et qu'on respectera
La liberté, les droits de l'homme, et cætera;
Cela sonne bien; mais toute âme un peu maligne
Finit par s'appuyer sur la troupe de ligne;
On couronne des plans sûrs,-et dans l'ombre prêts,
Par un massacre heureux qu'on fait bénir après.
Le scrupule commence où finit la victoire;
Tels sont les temps, tels sont les coeurs, telle est l'histoire.
N'es-tu donc pas honteux. qu'on t'appelle innocent?
Nous estimons, retiens ceci, le trois pour cent,
Un:grand sabre, et Bismarck; le reste, on le méprise. » -

Soit, imberbes docteurs, raillez ma barbe grise
Qui pourtant, ne devrait pas faire d'envieux
Oui, c'est vrai, je suis jeune, et vous, vous êtes vieux.
19 août.
XXII
RENTRÉE DANS LA SOLITUDE 12
Ô ses amis d'hier, pas d'aujourd'hui, qu'il trouve
La prudence pour vous bonne, et qu'il vous approuve,
Cela doit vous suffire. Il dit: Reniez-moi,
Et sourit. Il poursuit sa route sans émoi;

Il faut bien que le coeur des hommes se révèle.
Croyez-vous que ce soit une chose nouvelle
Pour lui qui reste droit lorsqu'on est à genoux,
De tenir tête aux sots, aux furieux, à vous?
'Quand Bonaparte était le maître de la terre,
Devant ce tout-puissant il fut le solitaire.
Braver, lutter, souffrir, ne sont-ce pas ses moeurs?
-N'a-t-il pas l'habitude ancienne des clameurs?
N'a-t-il pas; du sommet d'un roc dans les nuées,
Vu vingt. ans à ses pieds écumer les huées?
Vingt ans, couronne au front, l'empire n'a-t-il point
A cet homme pensif, d'en bas montré le poing?
Il avait l'oeil hagard des antiques prophètes.
Alors comme 'aujourd'hui c'était un fou. Donc, faites.
Adieu. Ce qu'il promit, il le tient maintenant,
Et c'est trop fort, il est fidèle, il est gênant.
Reniez-le. Tournez du côté de l'injure;
Tout doit finir. La vie est-elle une gageure?
L'entêtement d'un seul est un reproche à tous.
Le devoir des lions est de vieillir toutous;
Les vents époumonés ont dégonflé leur outre.
Pourquoi s'obstine-t-il, cet homme? Passons outre.
C'est bien. Il reste seul. L'ombre est devant ses pas,
Il connaît le désert et ne s'en émeut pas.
Il s'évanouira de nouveau dans l'abîme.
Soit. Mais, toutes les fois que pour commettre un crimè
Les ennemis publics se feront signe entre eux,
Peuple, toutes les fois qu'un homme désastreux
Dressera contre toi quelque embûche à sa guise,
Toutes les fôis qu'un bruit de couteau qu'on aiguise
Se mêlera sinistre au tumulte confus
Des noirs événements pareils aux bois touffus,
Chaque fôis qu'un vaisseau partira pour Cayenne,
Chaque fois que Paris, la ville citoyenne,
Sera livrée au sabre, et que la liberté
Sentira quelque pointe infâme à son côté,
Chaque fois que des pas tortueux et funèbres
Marcheront vers un but obscur dans les ténèbres,
Alors, dans la nuit lâche où s'éclipsent les lois,
On entendra gronder une lointaine voix,
On verra tout à coup un fantôme apparaître,
Et les hommes distraits reconnaîtront peut-être
Cette ombre à sa tristesse au fond du firmament,
Et cette conscience à son rugissement.

Vianden, juin 1871.
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