PLUME DE POÉSIES
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 Jean-Baptiste Caouette (1854-1922) SAMUEL CHAMPLAIN

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MessageSujet: Jean-Baptiste Caouette (1854-1922) SAMUEL CHAMPLAIN   Jean-Baptiste Caouette (1854-1922) SAMUEL CHAMPLAIN Icon_minitimeMar 1 Mai - 17:22

SAMUEL CHAMPLAIN


A L'HONORABLE JUGE A. B. ROUTHIER.

Stadaconé trônait dans sa majesté vierge
Au-dessus des flots bleus que roulaient sur la berge
Avec un bruissement clair.
A travers les réseaux de la vigne embaumée
L'indigène vivait dans sa hutte enfumée,
Libre comme l'oiseau de l'air.

Sur l'immense plateau couronné de verdure,
Les linotte mêlaient leur gracieux murmure,
Aux suaves rumeurs des eaux.
Rien ne troublait alors l'harmonie enivrante
Que l'onde, les rameaux et la brise odorante
Versaient à la voix des échos.

Maintes fleurs au soleil entr'ouvraient leurs corolles
Où les abeilles d'or, inconstantes et folles,
Cueillaient le miel délicieux.
Stadaconé semblait tressaillir d'allégresse,
Et de chaque taillis un chant rempli d'ivresse
Montait avec l'arôme aux cieux.

Mais soudain des clameurs mystérieuses, vagues,
Ayant l'air de surgir des profondeurs des vagues,
Interrompent ce doux concert;
Un long serpent de feu court à travers l'espace,
Et la voix du canon-à la brise qui passe-
Lance un rugissement d'enfer!

Un sauvage, à ce bruit, de son wigwam se sauve,
Croisant dans la forêt plus d'une bête fauve
Prise d'un fol effarement;
Mais bientôt il s'arrête au bord d'une clairière,
Et sur le fleuve voit une souple voilière
Mouiller l'ancre à l'abri du vent.

Un homme jeune encore, à la vaillante allure,
Portant moustache noire et longue chevelure,
S'élance sur le sable roux.
L'indigène, charmé par le noble visage
De celui qui paraît le chef de l'équipage,
Va se jeter à ses genoux.

Quel est donc l'inconnu qui vient fouler ces grèves
Que l'enfant des forêts-voyant s'enfuir ses rêves-
Dispute aux blancs en souverain?
Sauvage, incline-toi devant ce nouveau père
Qui rendra ton pays civilisé, prospère!
Incline-toi devant Champlain!

Il vient, au nom du roi qui règne sur la France,
Dissiper les erreurs, le vice et l'ignorance
Dans les coeurs naïfs ou pervers,
Fonder en Amérique une humble colonie
De la France éclairant par son vaste génie
Tous les peuples de l'univers!

Levant de l'avenir un coin du voile sombre,
Il voit des ennemis le combattre dans l'ombre
Comme des tigres enragés;
Mais sa foi, ses vertus, son esprit, sa prudence,
Le feront triompher, avec la Providence,
Des ennemis et des dangers.

Après avoir gravi le rocher gigantesque
Et contemplé longtemps le table pittoresque
Qui s'offre à ses regards ravis,
Il regagne les flots du beau fleuve qu'il aime,
Et, tout près de ses bords, il travaille lui-même

A bâtir le premier logis.
Champlain vient de jeter les bases de la ville
Où fleurira bientôt la grande loi civile
A côté de la loi de Dieu.
Il apprend que du Val, un Français malhonnête,
Conspire contre lui: du Val meurt, et sa tête
Sanglante, est mise au bout d'un pieu!

Il est sévère, soit! mais juste et charitable;
Sa bourse, son coeur d'or, son logis et sa table
S'ouvrent à tous les malheureux.
Et les chefs des tribus algonquine et huronne,
Touchés de ses bienfaits, posent une couronne
Sur son front noble et radieux!

Cet humble hommage émeut son âme magnanime
Et l'attache encor plus à la charge sublime
Qu'il tient de son seigneur et roi;
Car puisque dans ces coeurs il a déjà fait naître
Un peu de gratitude, il y fera peut-être
Briller les rayons de la foi.

Il leur enseigne à tous l'art de l'agriculture,
Et, vrai Cincinnatus, commence une culture
Que dieu couronne de succès.
C'est lui qui, le premier, arrache à cette plage
Le secret de donner au blanc comme au sauvage
Le pain, ce levier du progrès!

Mais l'illustre Français ne voit pas tout en rose;
Son front serein naguère est maintenant morose:
Il pleure sur le sort des siens.
Ah! c'est que, par delà les monts et les rivières,
Habite une autre race, aux instincts sanguinaires,
Qui l'outrage et pille ses biens!

C'est la race iroquoise, avide et dominante,
Qui veut anéantir cette ville naissante
Et régner sur tout le pays.
Elle hait les Hurons et les visages pâles
Et caresse l'espoir d'ouïr leur derniers râles
Et de mordre à leurs flancs roussis!

Champlain s'efforce encor d'apaiser les colères
Des Algonquins qu'il a traités comme des frères.
Mais à sa voix nul n'est soumis.
Les Iroquois d'ailleurs-véritables colosses-
S'avancent, l'arme au poing, l'oeil et les traits féroces
Pour attaquer leurs ennemis.

Un chasseur, survenant, confirme la nouvelle
que deux cents Iroquois, pris d'une ardeur nouvelle,
Viennent pour un combat prochain.
«Alors, répond Champlain, puisqu'ils veulent la guerre,
«Et, par orgueil, rougir de leur sang cette terre,
«Ils seront exaucés demain!»

Le soir, notre héros, entouré de ses braves
Qui n'ont jamais connu la honte des entraves,
Marche au devant des Iroquois.
Il les rejoint à l'aube, au milieu de leur danse,
Aux bords du lac Champlain.-Assoiffés de vengeance.

Les Hurons vident leurs carquois.
Le soleil, qui se lève, embrase la ramée
Où se tiennent Champlain et sa modeste armée
Un ennemi vient les voir;
C'est un chef que distingue un panache de plumes,
Et son accoutrement diffère ses costumes
Des autres monstres à l'oeil noir.

Levant son arme, il dit, d'une voix sombre et dure:
«A tous ces gueux il faut ôter la chevelure,
«Et la faire flotter aux vents!»
Champlain, sortant du bois, au premier rang se place,
Et, d'un coup d'arquebuse, en abat trois sur place,
Le chef et ses premiers suivants!

Ce coup fameux inspire aux Iroquois la crainte;
Ils luttent chaudement, mais leur bravoure est feinte:
La frayeur se lit dans leurs yeux!
Ils reculent bientôt en cohorte confuse,
Épouvantés qu'ils sont par les coups d'arquebuse
Que Champlain décharge sur eux!

Voyez-les déguerpir, ces guerriers si terribles
Qui devaient déchirer de leurs ongles horribles
Les cadavres de leurs rivaux!
Ils sont lâches, c'est vrai, mais-tigres indomptables-
Ils voudront assouvir leurs haines implacables
Contre Champlain et ses héros.

Les ans passent. Champlain quitte la colonie
Pour aller demander à la France bénie
Les soldats de la vérité.
Car ce n'est pas, dit-il par la poudre et les balles
Qu'on pourra subjuguer ces bandes cannibales:
Du prêtre il faut la charité!

Il revient au printemps, le coeur rempli de joie,
Avec de fiers colons que la patrie envoie
Escortés de religieux.
A sa charge il pourra se livrer sans relâche,
Laissant aux récollets la grande et sainte tâche
De gagner des âmes aux cieux!

Il fonde, il établit de florissants villages
Où naguère émergeaient des bourgades sauvages
Couvertes d'un maigre gazon;
A la brise aujourd'hui le blé d'or s'y balance,
Promettant au colon la joie et l'abondance
Pour les jours de l'âpre saison.

Il instruit l'ignorant, soulage l'infortune
Fait voir aux ennemis l'horreur de la rancune
Et prêche la fraternité;
Il soutient des combats qui le couvrent de gloire,
Et pose les jalons d'une héroïque histoire
Qu'il lègue à la postérité!

Québec n'est plus ce roc à l'aspect morne et sombre
Où venaient autrefois se reposer à l'ombre
Le chevreuil, la biche et l'élan.
La vigne et le noyer sont tombés sous la hache
La nature a jeté son large et vert panache

Pour se couvrir du drapeau blanc!
L'harmonie et l'amour ne sont plus dans les branches
Où l'oiseau se cachait, mais dans les maisons blanches
Pleines d'enfants frais et mignons.
Là vit de ses sueurs un petit peuple brave
Qui peut déjà répondre à l'Anglais qui le brave:
«J'attends l'effet de vos canons!» [1]

[Note 1: Réponse de Champlain à la sommation de David Kertk, 10 juillet
1628.]

Un peuple de héros à la trempe athlétique,
A l'âme généreuse, au coeur patriotique,
Luttant pour la France et ses droits:
Un peuple qui bénit du prêtre l'influence
Et coule sur ce sol une heureuse existence
A l'ombre sainte de la croix!...

C'est ton oeuvre, Champlain, ô gouverneur illustre!
C'est toi qui fis grandir, en lui donnant ton lustre,
Ce peuple honnête et vigoureux;
C'est toi qui le soutins aux heures de l'épreuve;
C'est toi qui l'attachas aux rives de ce fleuve;

C'est toi qui le rendis heureux!
Un quart de siècle et plus, tu manias sans trêve
La charrue ou l'outil, la parole ou le glaive
Pour assurer son avenir.
Et quand la mort parut au seuil de ta demeure,-
Où le peuple assemblé pleurait ta dernière heure,-
Sans trembler tu la vis venir!

Bien des ans ont passé depuis que ta grande âme
S'est envolée aux cieux, et la patrie acclame
Ton nom toujours retentissant.
Vois-grain de sénevé que tu jetas en terre-
Ces millions de coeurs te proclament leur père
De ce pays libre et puissant!

Ils rêvaient d'ériger sur le haut promontoire
Où ton astre brillant se coucha dans sa gloire,
Un bronze digne de renom;
Et ce rêve aujourd'hui, Champlain, se réalise:
Le peuple de Québec de zèle rivalise
Pour immortaliser ton nom.
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Jean-Baptiste Caouette (1854-1922) SAMUEL CHAMPLAIN
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