La belle veufve, et la belle Claudine.
Sonnet 54.
Elle est jeune, elle est belle, o dieux, mais elle est veuve !
Et je n' ay point cueilly la fleur de sa beauté ;
Peut-elle en cet estat forcer ma liberté,
Et tirer de ma flame une fidelle preuve ?
Quelque grace qu' elle ait, quelque bien que j' y treuve,
Ô que c' est un grand bien que la virginité !
Quiconque l' a connu, quiconque l' a gousté,
Ne peut plus s' abreuver des eaux d' un autre fleuve.
Sous l' auspice d' Hymen, j' obeis à l' amour,
Il m' attache à Claudine, et de nuit et de jour,
Il en fait mon thresor, il en fait mes delices.
Elle est douce à mon coeur, elle est belle à mes yeux
Les dieux aiment le champ dont ils ont les premices,
Et moy j' aime Claudine à l' exemple des dieux.