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 Théodore de Banville (1823-1891) Le Petit-Crevé

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MessageSujet: Théodore de Banville (1823-1891) Le Petit-Crevé   Théodore de Banville (1823-1891) Le Petit-Crevé Icon_minitimeDim 21 Aoû - 23:11

Le Petit-Crevé


Lyre, pinçant ta belle corde,
Je chanterai, car c'est mon plan,
Le Petit-Crevé, dont j'accorde
La découverte à Roqueplan.

De la Tamise jusqu'à l'Èbre,
On voit bâiller son pâle Ennui:
Comme crevé, l'Oeil que célèbre
Hervé n'est rien auprès de lui.

Plus endormi qu'une citerne,
Il végète. Faux col géant.
Favoris courts. Veston. L'oeil terne.
Signes particuliers: Néant!

Néant dans son regard qui boite,
Néant dans son gilet nouveau,
Et Néant dans la mince boîte
Où devrait être son cerveau!

Nommez à ce petit, qui crève
Avec un gant rouge à sa main,
Les grands espoirs qui sont le rêve
Et l'âme du génie humain;

L'Art, cette auguste idolâtrie
Pour notre paradis natal,
L'Honneur, la Vertu, la Patrie,
La Beauté, ce lys idéal;

Et, parmi ces choses divines,
La Liberté, dont tous les pas
Font tomber de vieilles ruines,
Il vous répondra: Connais pas!

Mais que Rosaura qui s'arrose,
Chaque matin, comme un rosier,
Passe, en cheveux couleur de rose,
Dans une brouette d'osier,

Croyant à ce qu'elle dérobe,
Vite il court s'incliner devant
Cette sorcière, dont la robe
N'est, hélas! pleine que de vent.

La grande cocotte funeste
Le fait longtemps poser debout
Au soleil. Puis après, le reste
Du temps, que fait-il? Rien du tout.

De sa fumée errante et bleue
S'entourant pour faire florès,
Il voyage dans la banlieue,
Empaqueté comme un londrès.

On le voit dans cinq ou six gares
Par semaine, sous l'oeil des cieux
Fumant en guise de cigares
Des troncs d'arbre prétentieux.

Aux Bouffes, (c'est là qu'il s'abonne,)
Il porte un stick céleste; mais
Il marivaude avec sa bonne
Et savoure cet affreux mets!

Et le soir, spectateur godiche,
Ce gandin, qu'on joue aux Menus-
Plaisirs, s'en va voir dans La Biche
De grands morceaux de femmes nus.

Ou bien tu cours où l'on ricane,
Divin Petit-Crevé, car ton
Bonheur est de montrer ta canne
Dans les théâtres de carton!

Mais que dis-je! carton toi-même.
Plus fuyant qu'un ciel de Corot,
Tu passes, chimérique et blême,
Comme Antinoüs ou Pierrot!

Être effacé, doux comme un ange
Et banal entre les fumeurs,
Tu vis, et rien en toi ne change,
O Petit-Crevé, quand tu meurs!
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Théodore de Banville (1823-1891) Le Petit-Crevé
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