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 Victor HUGO (1802-1885) Le mendiant du pont de Crassus, où se dresse

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James
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James


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MessageSujet: Victor HUGO (1802-1885) Le mendiant du pont de Crassus, où se dresse   Victor HUGO (1802-1885) Le mendiant du pont de Crassus, où se dresse Icon_minitimeDim 25 Sep - 17:31

Le mendiant du pont de Crassus, où se dresse
L'autel d'Hercule offert aux Jeux Aragonaux,
Est, comme à l'ordinaire, entre deux noirs créneaux,
Venu s'asseoir, tranquille et muet, dès l'aurore.
La larve qui n'est plus ou qui n'est pas encore
Ressemble à ce vieillard, spectre aux funèbres yeux,
Grelottant dans l'horreur d'un haillon monstrueux;
C'est le squelette ayant faim et soif dans la tombe.
Dans ce siècle où sur tous l'esclavage surplombe,
Où tout être, perdu dans la nuit, quel qu'il soit,
Même le plus petit, même le plus étroit,
Offre toujours assez de place pour un maître,
Où c'est un tort de vivre, où c'est un crime d'être,
Ce pauvre homme est chétif au point qu'il est absous;
Il habite le coin du néant, au-dessous
Du dernier échelon de la souffrance humaine,
Si bas, que les heureux ne prennent pas la peine
D'ajouter sa misère à leur joyeux orgueil,
Ni les infortunés d'y confronter leur deuil;
Penché sur le tombeau plein de l'ombre mortelle,
Il est comme un cheval attendant qu'on dételle;
Abject au point que l'homme et la femme, les pas,
Les bruits, l'enterrement, la noce, les trépas,
Les fêtes, sans l'atteindre, autour de lui s'écoulent;
Et le bien et le mal, sans le voir, sur lui roulent;
Tout au plus raille-t-on ce gueux sur son fumier;
Tout le tumulte humain, soldats au fier cimier,
Moines tondus, l'amour, le meurtre, la bataille,
Ignore cette cendre ou rit de cette paille;
Qu'est-il? Rien, ver de terre, ombre; et même l'ennui
N'a pas le temps de perdre un coup de pied sur lui.
Il rampe entre la chose et la bête de somme;
Tibère, sans marcher dessus, verrait cet homme,
Cet être obscur, infect, pétrifié, dormant,
Ne valant pas l'effort de son écrasement;
Celui qui le voit, dit: -C'est l'idiot!- et passe;
Son regard fixe semble effaré par l'espace;
Infirme, il ne pourrait manier des outils;
C'est un de ces vivants lugubres, engloutis
Dans cette extrémité de l'ombre où se termine
La maladie en lèpre et l'ordure en vermine.
C'est à lui que les maux en bas sont limités;
Du rendez-vous des deuils et des calamités
Sa loque, au vent flottante, est l'effroyable enseigne;
Sous ses ongles crispés sa peau s'empourpre et saigne;
Il regarde, voit-il? il écoute, entend-il?
Si cet être aperçoit l'homme, c'est de profil,
Nul visage n'étant tourné vers ses ténèbres;
La famine et la fièvre ont ployé ses vertèbres;
On voudrait balayer son ombre du pavé;
Au passant qui lui donne, il bégaye un Ave;
Sa parole ébauchée en murmure s'achève;
Et si, dans sa stupeur, et du fond de son rêve,
Parfois à quelque chose, ici-bas, il répond,
C'est à ce que dit l'eau sous les arches du pont.

Sa maigreur est hideuse aux trous de sa guenille.
Et le seul point par où ce fantôme chenille
Touche aux hommes courbés le soir et le matin,
C'est, à l'aube, au couchant, sa prière en latin,
Dans l'ombre, d'une voix lente psalmodiée.

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J'adore les longs silences, je m'entends rêver...  
James

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