BALADE.
Pour Dieu, gardez bien souvenir
Enclos dedens vostre pensée,
Ne le laissiez dehors yssir,
Belle tres loyaument amée;
Faictes que chascune journée
Vous ramentoive bien souvent
La maniere quoy et comment,
Ja pieca, me feistes promesse,
Quant vous retins premierement
Ma Dame, ma seule maistresse.
Vous savez que, par franc desir
Et loyal amour conseillée,
Me deistes que, sans departir,
De m'amer estiez fermée;
Tant comme j'auroye durée.
Je metz en vostre jugement
Se ma bouche dit vray ou ment;
Si tiens que parler de princesse
Vient du cueur, sans decevement,
Ma dame, ma seule maistresse.
Non pourtant, me fault vous ouvrir
La double qu'en moy est entrée:
C'est que j'ay paour, sans vous mentir,
Que ne m'ayez, tres belle née,
Mis en oubly; car mainte année
Suis loingtain de vous longuement,
Et n'oy de vous aucunement
Nouvelle pour avoir liesse;
Pourquoy vis douloreusement,
Ma Dame, ma seule maistresse.
Nul remede ne scay querir,
Dont ma doleur soit allegée;
Fors que souvent vous requerir,
Que la foy que m'avez donnée
Soit par vous loyaument gardée;
Car vous congnoissiez clerement
Que, par vostre commandement,
Ay despendu de ma jeunesse,
Pour vous actendre seulement,
Ma Dame, ma seule maistresse.
Plus ne vous convient esclarsir
La chose que vous ay comptée;
Vous la congnoissiez, sans faillir;
Pour ce, soyez bien advisée
Que je ne vous trouve muée;
Car, s'en vous trouve changement,
Je requerray tout haultement,
Devant l'amoureuse Deesse,
Que j'aye de vous vengement,
Ma dame, ma seule maistresse.
L'ENVOY.
Se je puis veoir seurement
Que m'amez tousjours loyaument,
Content suis de passer destresse
En vous servant joyeusement,
Ma Dame, ma seule maistresse.