PLUME DE POÉSIES
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 Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.

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MessageSujet: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:22

XI Course A La Fée.

Jeannin était le meilleur coureur du pays, mais la fée allait comme le vent.
L’hésitation du petit coquetier avait laissé à la fée une centaine de pas
d’avance. Après dix minutes de course, elle ne semblait pas avoir perdu un pouce
de terrain.

Elle allait droit à la grève.

Jeannin jeta ses sabots. Il était déjà tout en sueur.

Mais il redoublait d’efforts.

-Heureusement que la mer est basse, se disait-il; car la fée marche sur l’eau
aussi bien que sur le sable, et sur l’eau je ne pourrais pas la suivre...

-Mais pourquoi n’a-t-elle pas pris l’écuellée de gruau? se demandait-il
l’instant d’après. Le gruau était bon pourtant, ce soir! Peut-être qu’elle aime
mieux la galette de froment.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:22

Et ces méditations sérieuses ne l’empêchaient pas d’avaler la route, comme on
dit, le long du Couesnon. Maintenant qu’il avait les pieds nus, Dieu sait qu’il
faisait du chemin! Le sentier qu’ils suivaient, lui et la fée, descendait à la
grève et décrivait mille détours entre les haies. La lune était brillante.
Chaque fois que la fée disparaissait à un coude de la route, Jeannin, tournant
le coude à son tour, l’apercevait de nouveau, légère comme une vision.

Elle ne faisait point de bruit en courant; du moins, Jeannin n’entendait plus
son pas.

Une fois, il crut la voir se retourner pour jeter un regard en arrière.

C’était tout près de la grève, sous un moulin à vent ruiné qui s’entourait de
broussailles et de petites pousses de tremble au blanc feuillage.

La fée qui, sans doute, jusqu’à ce moment, ne se savait pas poursuivie, sauta
brusquement dans les broussailles.

Jeannin la perdit de vue.

Il fit le tour du moulin. Derrière le moulin, c’était la grève uniformément
éclairée par la lune, et où personne ne pouvait certes se cacher.

Il n’y avait point de brume. On voyait au loin, noir tous deux et distincts sur
l’azur du laiteux ciel, le Mont-Saint-Michel et Tombelène.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:23

Jeannin tourna autour du moulin ruiné. Puis, sans perdre son temps à battre les
broussailles, il se jeta sur le ventre et colla son oreille contre le sable.

Il entendit trois choses: à l’ouest, du côté de Saint-Jean, des pas de chevaux
sonnant sur les cailloux du chemin, au nord, la voix sourde de la mer, vers
l’orient, un pas léger.

Ce dernier bruit était si faible, qu’il fallait l’oreille du petit Jeannin pour
le saisir.

Il se leva radieux.

-Elle est à moi! pensa-t-il.

Et il bondit comme un faon dans la direction du bruit léger qui était celui du
pas de la fée.

La fée était rentrée dans les terres au moment où Jeannin tournait le moulin.
Pour protéger une fuite, la grève est trop découverte. La fée ne savait
probablement pas à quel genre d’ennemi elle avait affaire.

Elle songeait à bien d’autres qu’au petit Jeannin! Quand elle avait regardé en
arrière, elle avait vu quelque chose qui se mouvait sur la route.

Voilà tout. Car la lune était au couchant et prenait Jeannin à revers, tandis
qu’elle éclairait en plein la fée.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:23

La pauvre fée s’était dit: -Celui-là est en avant parce qu’il court plus vite,
mais les autres viennent après! Les autres, c’étaient les hommes d’armes et les
soudards endormis naguères dans la grand’salle du manoir de Saint-Jean.

Elle les avait bravés dans sa témérité folle. Ils venaient la punir.

La fée ne se trompait pas de beaucoup, car, en ce moment même, huit ou dix
cavaliers descendaient le tertre de Saint-Jean et prenaient au galop le chemin
de la grève.

Seulement, le petit Jeannin ne servait point d’avant-garde à cette troupe de
cavaliers. Il chassait pour son propre compte.

La fée avait jugé tout de suite qu’elle ne pourrait échapper que par la ruse.

Or, bon Dieu! Depuis quand les fées ont-elles besoin de ruse? Ne savait-elle
plus, cette fée, enfourcher les rayons d’argent de la lune qui étaient sa
monture ordinaire? Ne pouvait-elle bondir en se jouant par-dessus les chênes
ébranchés du Marais, par-dessus les pommiers, par-dessus les trembles aux
feuilles de neige? Ou glisser, plus rapide que l’éclair, sur la grève mouillée,
franchir les lises et plonger sous le flot, jusqu’à ces grottes diamantées qui
sont, comme chacun sait, au fond de la mer? Vraiment, ce n’est pas la peine
d’être fée quand il faut s’essouffler par les chemins battus, donner le change
comme un lièvre aux abois et se cacher dans les broussailles! Ce raisonnement
était à la portée du petit Jeannin; s’il l’eût fait, peut-être aurait-il arrêté
sa course, car c’était une vraie fée qu’il lui fallait, une fée pouvant changer
sa misère en opulence.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:23

Et non point une fée de hasard, tremblant la peur comme une fillette.

Mais il ne fit pas ce raisonnement. Il avait confiance.

-Elle est à moi! avait-il dit.

Il se croyait désormais sûr de son fait.

Le bruit léger que saisissait son oreille collée contre terre était dans la
direction du Couesnon.

En coupant droit au Couesnon sans quitter les bords de la grève, Jeannin
s’épargnait tous les détours des sentiers qui serpentent à travers les champs.
Il s’élança dans cette voie nouvelle avec ardeur.

Il ne se souvenait même pas d’avoir eu peur. Il souriait.

La fée n’avait qu’à se bien garer! Ce sont d’étranges rivières que les cours
d’eau qui sillonnent les grèves. Le Couesnon surtout, la Rivière de Bretagne.

Aucun fleuve ne tient son urne d’une main plus capricieuse. Torrent aujourd’hui,
humble ruisseau demain, le Couesnon étonne ses riverains eux-mêmes par la
bizarre soudaineté de ses fantaisies. On aurait dû lui donner un nom féminin,
car cette fantasque humeur ne sied point à un dieu barbu, à moins qu’il ne soit
en puissance de naïade.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:23

Parfois, en arrivant sur les bords du Couesnon, vous diriez un étang desséché.
Ses berges, creusées à pic par le flot qui s’est retiré, semblent des murailles
de marne verdâtre. Loin des rives, au milieu du lit, un étroit canal passe; le
Couesnon y coule en bavardant sur des galets.

La veille, sous le pont pittoresque, le Couesnon grondait, blanc comme les
fleuves puissants qui tourmentent le limon de leur lit; le Couesnon tonnait
contre les piles du pont. Le Couesnon était fier.

Ce jour-là, il prodigua l’eau de son urne, sans souci du lendemain.

Comme ces fils de famille qui éblouissent la ville avant de lui inspirer de la
compassion, le Couesnon a fait des folies.

Et le voilà aujourd’hui tout humble, tout petit, tout réduit, encore comme un
pauvre diable entre la dernière nuit d’orgie et le premier jour d’hôpital.

Mais ce n’est rien tant qu’il reste en terre ferme.

Quand il attaque la grève, le caprice des sables s’ajoute au caprice de l’eau,
et c’est entre eux une lutte folle.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:23

Le Couesnon est le plus fort. La grève lui appartient toute entière. Il y
choisit sa place, aujourd’hui à droite, demain à gauche. Ne le cherchez jamais
où il était la semaine passée.

Il coulait ici; c’est une raison pour qu’il soit ailleurs. D’une marée à l’autre
il déménage. Ce filet d’eau qui raie la grève et qui la tranche en quelque sorte
comme le soc d’une charrue, c’est le Couesnon.

Il est vrai que cette grande rivière, large comme la Loire, on la passe sans
mouiller ses jarretières.

Dans ce cas-là, le Couesnon étale sur le sable une immense nappe d’eau de trois
pouces d’épaisseur; le soleil s’y mire, éblouissant. Vous diriez une mer.

Et cette mer a ses naufrages, ses sables tremblent sous les pas du voyageur; ils
brillent, ils s’ouvrent, on s’enfonce; ils se referment et brillent.

Elle doit être terrible, la mort qui vient ainsi lentement et que chaque effort
rend plus sûre, la mort qui creuse peu à peu la tombe sous les pieds même de
l’agonisant, la mort dans les tangues.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:24

Et que de trépassés dans ce large sépulcre! Les gens de la rive disent que le
deuxième jour de novembre, le lendemain de la Toussaint, un brouillard blanc se
lève à la tombée de la nuit.

C’est la fête des morts.

Ce brouillard blanc est fait avec les âmes de ceux qui dorment sous les tangues.

Et comme ces âmes sont innombrables, le brouillard s’étend sur toute la baie,
enveloppant dans ces plis funèbres Tombelène et le Mont- Saint-Michel.

Au matin, des plaintes courent dans cette brume animée; ceux qui passent sur la
rive entendent: -Dans un an! Dans un an! Ce sont les esprits qui se donnent
rendez-vous pour l’année suivante.

On se signe. L’aube naît. La grande tombe se rouvre, le brouillard a disparu.

Au moment où le petit Jeannin arrivait sur les bords du Couesnon, la cavalcade
partie du manoir de Saint-Jean s’arrêtait aussi devant la rivière. On sembla se
consulter un instant parmi les hommes d’armes, puis la troupe se sépara en deux.

L’une remonta le cours du Couesnon, du côté de Pontorson, l’autre poursuivait sa
route vers la grève.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:24


Jeannin ne savait pas quel était le motif de cette marche nocturne.

Il se tapit dans un buisson pour laisser passer les cavaliers qui descendaient à
la grève.

Les cavaliers passèrent. -Mais la fée? Le pauvre Jeannin avait perdu sa trace.

Hélas! hélas! les cinquante écus nantais! Jeannin mit encore son oreille contre
terre.

Peine inutile. Le pas lourd des chevaux étouffait tout autre bruit.

La fée s’était-elle cachée comme lui pour éviter les soudards? La fée avait-elle
franchi le Couesnon? Il ne savait. Pour comble de malheur, la lune était sous un
nuage.

On ne voyait rien en grève.

Jeannin était consterné. Il avait bien envie de pleurer. Désormais, la fée
allait se défier de lui.

Jamais, au grand jamais, il ne devait trouver l’occasion si belle.

Il s’assit, de guerre lasse, et mit sa tête entre ses mains.
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MessageSujet: Re: Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée.   Paul Henri Corentin Féval. (Père) (1816-1887) La Fée des Grèves.XI Course A La Fée. Icon_minitimeLun 18 Fév - 14:24

Comme il était ainsi, quelque chose frôla ses cheveux. Il se leva en sursaut et
poussa un cri.

Un autre cri faible lui répondit.

C’était la fée qui sautait dans le courant du Couesnon.

Elle ne savait donc plus courir sur l’eau sans mouiller la pointe de ses pieds,
la fée? Jeannin n’eut garde de se faire à lui-même cette indiscrète question.

Il reprit sa course.

La fée avait déjà gravi l’autre rive.

Bonté du Ciel! ce qui avait frôlé les cheveux du petit Jeannin, c’était le voile
de la fée. S’il avait eu l’esprit seulement d’avancer le bras! De l’autre côté
du Couesnon, il fallait décidément entrer en grève ou prendre le chemin des
bourgs normands qui avoisinent la côte. Ce chemin tourne le dos au Mont-Saint-
Michel; et, d’après la première direction suivie, Jeannin pensait bien que la
fée allait vers le Mont-Saint- Michel
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